Gypse a maintenant sept mois. Depuis trois semaines, elle bénéficie de mes cours particuliers pour travailler en ma
compagnie sur le troupeau. En effet, s'il est bon que le chien de berger puisse exprimer ses capacités naturelles sur les moutons, il demeure primordial qu'il le fasse d'abord à la demande, même
si ses initiatives pourront être utiles quand il sera instruit.
Pour cela jusqu'à six mois Gypse a appris bien des messages à son intention: "stop", "assis", "couché", "viens" pour
m'accompagner, "viens là" pour revenir à moi, "là (le fameux aux pieds pour d'autres, mais que je n'aime vraiment ni entendre ni exprimer même si cela ne change rien pour le chien...)",
"c'est fini" pour indiquer la fin d'une activité, "pas maintenant" pour lui indiquer qu'elle doit contenir son impatience, "sors", "monte", "descends", "saute", "repos", "bois", "mange", "reste"
pour ne pa suivre, "pas bouger", "on va se promener", "on va au travail" ... et j'en oublie sans doute. Effectivement, le "non" d'interdit et le "oui, ou oui c'est bien" en caresse vocale
qui sont essentiels. Rien de militaire en tout cela, que du pratique pour des années de vie commune, de partage et de complicité. De l'utile pour elle comme pour moi.
De l'utile au quotidien dans toutes les situations de la vie, mais également au troupeau. Avant d'être autorisée au
contact des moutons, ma chienne devait obéir au "stop" et au rappel "viens là" afin d'éviter tout débordement.
Ces dernières semaines, Gypse a d'abord travaillé au filet. C'est à dire par rapport à la dizaine de Ouessant contenus
pour chaque séance quotidienne à l'intérieur d'un cercle limité par le filet mobile. Elle a ainsi pu apprendre à se placer le plus souvent possible "à midi", à mon opposé, les
moutons entre nous. Elle maîtrise sa "gauche", sa "droite".
Elle a compris le "avance", le "amène". Elle travaille encore le "va loin", "va chercher", "recule", ... selon les situations
sur le lot d'animaux libres de mouvements (sans filet). Avoir compris est en effet une chose mais l'avoir acquis ou encore savoir se comporter en conséquence en sont la
finalité.
Quelques instants avec ma jeune louve....
Début de séance. Apprentissage de l'arrivée au parc, sans laisse cette fois, avec seul lien la voix. Gypse veut "y
aller" mais le désir du chef de meute que je suis, exprimé vocalement, l'emporte.
On perçoit tout son conflit intérieur dans son attitude.
Gypse finit par se détendre tout en demeurant attentive.
On va pouvoir y aller. Une recherche assez proche pour commencer.
Un contournement par la droite pour se mettre en position midi
User de son pouvoir d'intimidation (la puissance) pour faire bouger la troupe qui elle voit en la personne
du berger une sorte de brebis meneuse vers qui on se réfugie. La puissance, celle d'un chien qui sait se faire obéir des ovins, sans violence pour autant. Ce n'est que le début mais Gypse
est peut-être un peu faible à ce niveau sur certains animaux. L'avenir dira.
L'intérêt du chien pour le troupeau exprimé par son regard, l'oeil. Trop d'oeil pourrait bloquer Gypse. L'idéal serait
un oeil moyen, c'est à dire un intérêt certain mais une concentration pas trop excessive pour entendre encore les injonctions du chef de meute sur deux jambes.
Une recherche plus lointaine en exigeant un contournement large sans quête de contact avec le groupe.
Passage du ruisseau. La chienne est un peu proche sur des moutons émotifs et devrait être à l'arrêt, voire couchée.
Prenant le cliché je ne la guide plus...
Arrive ce qui devait arriver. Le groupe éclate. Les retardataires trop inquiets se séparent de la troupe. Pour excuser Gypse
et le berger, il faut dire que travailler sur des Ouessant est un exercice généralement difficile. En effet ce type ovin n'a jamais été une race bergère et la plupart des souches demeurent
très vives sans forcément ce fameux réflexe de moutons de Panurge à se regrouper en une seule masse mouvante, devenant alors comme un seul animal à eux tous réunis.
Sur ordre de cessation d'activité, Gypse est envoyée se désaltérer. Elle fait bien plus en se rafraîchissant totalement. Elle
refroidit ainsi son corps en surchauffe.
Un chien ne transpire pas et la chaleur est bien plus souvent son ennemi que le froid.
Elle retournerait bien aux moutons, mais le patron a dit "c'est fini" ou plutôt "Gypse, .... c'est fini" car il
est bon de prononcer le nom du chien pour renforcer le fait qu'on s'adresse à lui et qu'on émet donc une
attente.
Une vingtaine de minutes de travail quotidien, des jours fériés de temps à autre et tout mûrit dans la petite tête. Gypse
doit reconnaître mes messages (ordres), les comprendre, les assimiler, réagir en conséquence selon les situations et coopérer en exécutant. Tout cela demande du temps et de la pratique. Il ne me
faut pas aller trop vite, revenir sur ce qui semble faible, ne passer à une nouveauté que lorsque les bases sont solides. Aussi Gypse travaille encore au filet pour consolider certains points.
Cependant l'ennui arrive vite; alors le contact direct avec le troupeau relance son intérêt. Le chien doit trouver aussi son plaisir à travailler et non avoir seulement le
sentiment d'obéir "bêtement".