Elever des Ouessant, même par loisir, demande de consacrer du temps à ses animaux, tout autant pour assurer leurs besoins incontournables que pour profiter de leur présence et donc les observer, les analyser.
Que l'on soit en activité professionnelle ou enfin en retraite, si un regard quotidien sur ses animaux s'impose donc, selon la saison et le temps disponible, logiquement, tout éleveur aime également passer des heures à les savourer du regard et se fondre parmi eux, bref s'y consacrer. C'est ainsi qu'on les connaît et les reconnaît. C'est ainsi qu'on appréhende ce type ovin, qu'on envisage quête de savoir et directions d'élevage.
Ainsi chez les Lutins, le berger reconnaît chacun de ses moutons individuellement.
Comme il a pu déjà le raconter par ailleurs, il n'existe pas deux Ouessant identiques. Tout comme un enseignant est capable de reconnaître les élèves de sa classe ou ceux de l'ensemble de son groupe scolaire, quels que soient leurs changements d'habillement ou de coupe de cheveux, le bon berger est à même d'identifier chacun de ses animaux d'un simple regard, qu'ils soient dix ou cent (d'où l'utilité de donner un nom à ses animaux, à moins d'être un habitué du loto et préférer les numéros).
Connaître ses animaux, c'est connaître le caractère de chacun. C'est également connaître leur histoire sur toute leur vie (telle anecdote, tel souvenir, telle blessure, telle force ou faiblesse, ....).
C'est aussi, ce qui impressionne souvent le visiteur de passage chez les Lutins, en connaître de mémoire l'ensemble de ses ascendants, sur "n" générations dans les moindres embranchements, sans besoin de reprendre ses fiches qui récapitulent tout sur chaque Lutin.
S'il est aisé de reconnaître ses béliers, le bon berger saura identifier chacune des brebis, nue ou habillée. Question de présence, d'habitude, d'observation et de volonté
Qui est qui?
Prunelle! Fille de et de ..., petite fille de, de, de et de ..., arrière-petite-fille de, de ...., arière-arrière .....
Prunelle! Mère de et de... avec tel et tel amoureux...
Pourquoi cet article dont j'ai déjà abordé le sujet de fond?
Parce qu'hier, alors que j'avais regroupé la cinquantaine de femelles, je m'aperçus qu'à 200 m trois brebis étaient demeurées sur place à leurs occupations, n'ayant pas vu le mouvement à cause d'un petit relief.
Par réflexe je m'interrogeai sur le "qui est qui?". Rien dans la coloration ne pouvait me mettre précisément sur la piste. Pourtant, après un balayage du regard sur la troupe présente, malgré la distance déjà conséquente, je définis à leur silhouette et leur allure qu'il s'agissait de Phaeo, Muse et Ronnie.
En redescendant, je vérifiai mon observation et...bingo!...c'était bien cela. Petit sentiment de fierté qui me confirmait que vivre ses moutons pouvait mener très loin dans des méandres de subtilités que seuls d'autres esprits avertis pouvaient mesurer.
Ah qu'il est bon de se jeter des fleurs et sentir ses chevilles gonfler...!!!