Depuis un mois que les Lutins sont tondus, il fait chaud, très chaud.
Il n'a guère fallu plus d'une semaine, avec des journées à 40 degrés à l'ombre, pour que la sécheresse se ressente faute d'eau dans les sols.
De plus, l'insolation a vite grillé l'herbe exposée au sud.
Seules les fougères, inutiles pour les ventres des ovins, sont encore vertes … à la veille de passer sous la faux pour tenter affaiblir ces envahissantes.
Les Ouessant retrouvent la prairie réservée provisoirement aux ânes depuis début avril et libérée à présent par les grandes oreilles. Ces derniers y ont laissé toute une variété de refus, plantes qu'ils ne consomment pas, et qui fait le bonheur des moutons (lotier, centaurée, rumex, renoncule …). Les divers herbivores sont complémentaires dans la pression sur une prairie.
Cela tape encore dur en soirée et sur les zones où la moquette est rase, on a du mal à imaginer quelles minuscules plantules savoureuses les Lutins peuvent se donner la peine de grignoter.
Pourtant, c'est si bon que certains y passent beaucoup de temps, d'autant que pour remplir une panse, aussi petite soit elle chez une brebis de moins de quinze kilos, il faut se consacrer pleinement à l'occupation. Brouter, toujours brouter.
Les plus raisonnables, font cela en demeurant à l'ombre.
Les plus futés, mais question aussi de besoins et de goûts, exploitent les milieux habituellement humides qui offrent encore de la verdure ...
… et où il fait bon se reposer dans cette illusion de fraîcheur.
Le scénario météorologique de l'an passé semble se répéter. C'est à nouveau inquiétant, d'autant que depuis l'automne il y a eu déficit de précipitations chez les Lutins et que les quelques averses trop rares du printemps, de souvent seulement deux ou trois millimètres, n'ont fait que mouiller l'herbe, la pluie ne gagnant pas le sol et s'évaporant dès le lendemain.
En conséquence, les réserves de foin ont été un peu plus importantes que les autres années, afin de pouvoir subvenir face au pire qui menace.