Un mouton "blanc" n'est pas forcément uniquement blanc, tout comme un mouton "noir" n'est pas forcément uniquement noir.
Comment connaître le génotype (héritage génétique) de coloration précis d'un animal?
Petits rappels pour les "nuls" (ce qui n'a rien de péjoratif) parce qu'ils découvrent ce sujet ou qu'ils sont hermétiques aux approches plus "scientifiques" qui peuvent faire peur, comme je l'ai souvent constaté.
Ce sont les gènes qui déterminent les caractéristiques, le plan de construction d'un animal.
D'un point de vue génétique, un animal hérite tout autant de sa mère que de son père, donc respectivement pour moitié du codage génétique de chacun. (Parents qui eux-mêmes ont hérité de leurs parents sur le même principe, etc ...).
Les gènes sont ainsi associés par paire concernant un caractère de construction.
Certains gènes sont dominants sur d'autres, c'est à dire que s'ils ont été transmis, ils prendront le dessus pour s'exprimer sur d'autres (et inversement certains sont donc dominés, dits récessifs). De fait, il peut y avoir une partie cachée de l'animal derrière ce qui s'affiche quand on le voit ( partie invisible mais faisant bien partie du patrimoine génétique ... et qui pourra, selon les occasions, être transmise à une future descendance).
Aussi le fait qu'un Ouessant affiche telle ou telle coloration est conséquence de l'héritage génétique d'un parent, voire des deux selon la coloration considérée.
Ainsi un animal est dit homozygote pour un gène donné, quand il a hérité de chacun de ses deux parents du même gène.
Par contre il est dit hétérozygote quand il a hérité de deux gènes différents.
Toute la difficulté est donc, devant un animal, de savoir si ce dernier est homozygote ou hétérozygote pour la coloration qu'il affiche.
Commençons par la plus simple des situations, la couleur brune affichée.
Un Ouessant brun est forcément homozygote pour cette coloration. Le gène brun étant récessif par rapport au noir (c'est à dire dominé par le noir), la coloration brune ne s'affiche que si elle est héritée à la fois du père et aussi de la mère.
Ce fait est intéressant également pour connaître le patrimoine génétique des parents au cas où l'un ou les deux n'afficheraient pas cette coloration. On saurait alors que ce dernier (ou ces derniers) serait (seraient) porteur(s) de la coloration brune.
Lorsqu'il s'accouple, un mouton brun peut uniquement transmettre le gène brun à sa descendance.
Concernant un Ouessant noir, deux cas possibles.
Premier cas. L'animal est dit noir homozygote, c'est à dire qu'il a hérité de ce gène de coloration de chacun de ses deux parents. Un tel mouton transmettra par la suite uniquement le gène noir à sa descendance.
Second cas. L'animal est dit noir hétérozygote pour ce gène, c'est à dire que ce gène de coloration ne lui a été transmis que par un seul parent, l'autre parent lui ayant fait hériter d'une autre coloration récessive (donc non visible), en fait la brune qui est la seule possible. Un tel mouton pourra donc transmettre par la suite à son futur petit, le gène noir ou le gène brun.
Le cas d'un Ouessant blanc.
Un Ouessant qui aurait hérité cette coloration de chacun de ses deux parents, serait dit homozygote pour ce gène, comme on l'a expliqué précédemment pour d'autres colorations.
Le gène blanc est dominant sur tous les autres. Ainsi un Ouessant blanc, dans le cas où il serait hétérozygote pour ce gène, pourrait diffuser, parce qu'il les cache, la coloration noire ou encore brune selon ses parents et ancêtres. De même, les patrons dits "grey", ou "swiss", ou "rusty" ... pour se limiter aux gènes présents dans le paysage de ce type ovin pourraient très bien se cacher dans un mouton blanc (hétérozygote dans ce cas je rappelle).
J'ai l'habitude de dire: "Attention, un Ouessant peut en cacher un autre (voire des autres)", pour faire allusion au fait que concernant un mouton, sa coloration exprimée peut très bien en réalité cacher un patrimoine génétique plus vaste en ce domaine.
Connaître le génotype de coloration de chacun de ses moutons permet d'orienter les accouplements si on souhaite certains résultats plus que d'autres dans ce domaine de l'habit (qui ne fait pas forcément le moine).
L'éleveur qui orchestre les accouplements de ses Ouessant et qui suit ses animaux sera le plus souvent à même de définir le génotype de coloration de chacune de ses naissances.
Mais pas toujours, car selon les parents d'un jeune donné, il peut ignorer si un gène (récessif donc non exprimé) de coloration a été transmis ou pas. Il en est de même de la personne qui a acquis un Ouessant sans rien connaître de ses origines, ses parents, ses ancêtres.
Tout cela pour arriver à la question du titre de cet article "Hétéro(zygote) ou homo(zygote)?"
Ce n'est qu'à l'occasion de la reproduction du Ouessant sur lequel on s'interroge, qu'on pourra le découvrir. Parfois, ce ne sera que lors de la toute dernière reproduction de l'animal ,ou encore suite à certains résultats lorsque sa descendance se reproduira à son tour, ... et donc même après la mort du Ouessant mystère.
Dans certains cas, l'interrogation demeurera faute de résultats, la transmission d'un gène donné dans une paire étant aléatoire.
L'éleveur qui découvrirait une naissance brune issue avec certitude d'un Ouessant noir (qu'il soit mâle ou femelle) saurait alors que son Ouessant est un noir hétérozygote (car donc porteur de brun)... et que l'autre parent également, si ce dernier n'était pas brun affiché.
Si maintenant l'éleveur suspecte ou espère que son Ouessant noir est porteur de brun, il lui faut l'accoupler à un partenaire brun. En cas de naissance brune, il y aurait confirmation que le Ouessant étudié est bien un noir hétérozygote.
Mais! La probabilité de vérifier cela diffère grandement s'il s'agit d'une brebis ou d'un bélier, sur qui on s'interroge. En effet, si à la base il y a une chance sur deux pour que le gène brun d'un animal noir hétérozygote soit transmis, dans les faits, le hasard peut ne jamais le faire sortir pour toutes les naissances données par une brebis. Une femelle donnant au mieux huit naissances durant sa vie, même noire porteuse de brun et accouplée systématiquement à un mâle brun, la possibilité qu'elle donne série de huit jeunes noirs existe (tout comme sous un autre angle des probabilités, elle ne pourrait donner que des mâles ou que des femelles durant toute sa vie). L'absence de naissance brune pour une brebis noire ne certifie donc pas qu'elle n'est pas porteuse de brun.
Dans le cas d'un bélier noir, il est théoriquement plus aisé de vérifier qu'il est porteur de brun. En effet, mathématiquement, si on l'y autorise, un bélier peut féconder 30/40 brebis durant l'automne/hiver... et si de plus on lui offre une carrière de dix ans comme reproducteur, la probabilité que le gène brun ne sorte jamais tend vers zéro. Pour lui, tout dépendra donc du nombre de brebis brunes offertes pour prétendre tirer conclusion sur son génotype, si noir hétérozygote.
On peut se poser questions identiques face à un Ouessant blanc, mener expériences en l'accouplant à partenaires noirs (ou même bruns éventuellement) pour tenter définir s'il s'agit d'un blanc hétérozygote ou homozygote ... en considérant que les limites précédentes demeurent
Y a plus qu'à! La lutte étant bien entamée dans beaucoup d'élevages, un peu tard pour redéfinir accouplements, mais reste à se pencher sur les naissances futures pour tirer d'éventuelles conclusions sur le génotype de coloration des petits nouveaux... ou même ceux des parents...
Paramètre important cependant pour pouvoir raisonner sur des bases exactes, avoir certitude de la paternité de tout animal, mais également de la maternité car il existe parfois des échanges d'agneaux entre mères proches lors de naissances simultanées (et de manière exceptionnelle, adoption par une mère ayant perdu son jeune).
(PS: Il n'est question dans cette enquête en un élevage, que des différents patrons du Ouessant et ses couleurs, en faisant abstraction des gènes à effet sur une toison, pour qui une approche supplémentaire s'impose. Peut-être dans un autre article!)
Petit clin d'oeil aux amateurs de caprins, en particulier miniatures chez qui on rencontre la plus grande multitude de robes qui soit, du fait que ce type caprin, qui ne se définit que par une taille réduite, s'enrichit depuis longtemps de la génétique d'un peu tous les autres types et races domestiques de chèvres.
Il est possible de se poser les mêmes questions pour ses animaux et tenter y répondre par les résultats d'accouplements (sous condition de savoir identifier les différents patrons et différentes colorations). Cependant il apparaît que pour cette catégorie de chèvres, bon nombre de sujets semblent concernés par le gène modificateur du locus Extension, ce qui bouleverse les données et le raisonnement à appliquer (les couleurs noire et brune (chocolat) devenant génétiquement dominantes sur les divers patrons).
Je m'y applique avec mes biquettes (et ce que j'observe chez les autres éleveurs) et suis donc intéressé par tout témoignage sur ces sujets, échange de constats avec d'autres éleveurs...