Mi-mars, selon les régions et la météo du moment, les premières hirondelles de retour d’Afrique font halte migratoire en particulier au-dessus des plans d’eau où elles capturent les insectes
volants et sont donc particulièrement repérables en ces lieux.
Par le mot hirondelle, on pense généralement aux deux principales espèces qui nichent sur les constructions humaines (hirondelle rustique et hirondelle de fenêtre), mais trois autres plus spécialisées et plus localisées se reproduisent en France : l’hirondelle de rochers (qui niche parfois également sur bâtiments), l’hirondelle de rivage et l’hirondelle rousseline.
Parmi les deux plus communes particulièrement liées à l’homme et ses édifices, l’hirondelle rustique (autrefois appelée « des cheminées » pour son habitude en certaines régions, comme en Bretagne, à nicher dans ces conduits) est la plus campagnarde.
La régression de ces dernières décennies, pour ne pas dire l’effondrement, des populations de nos deux hirondelles les plus proches des activités humaines n’a pas échappé au simple regard de tout un chacun. Ce constat bien réel se trouve confirmé par les études ornithologiques menées sur ces espèces.
Entre lamentations et actions de préservation, la disparition des hirondelles est à la fois un vrai et faux problème.
Un vrai problème d’abord puisque bien réel.
Un faux problème tout à la fois, puisque l’hirondelle est l’oiseau dont le niveau des populations est intimement lié à l’histoire de l’humanité, à tel point que les nicheurs en milieu naturel sont très rares actuellement. Avant l’homme et ses maisons, cet oiseau nichait essentiellement sur les parois des cavernes et abris sous roches. Au cours des millénaires, il a su tirer profit des nouveaux nichoirs bâtis que les humains lui offraient involontairement, construits au fur et à mesure que l’architecture des édifices évoluait. Cette aubaine pour l’espèce a sans aucun doute dû permettre à l’hirondelle d’augmenter ses effectifs ainsi que d’étendre ses aires de répartition. Au point que personne ne peut dire aujourd’hui ce qu’il en était de ces petites bêtes avant le néolithique. Aubaine pour l’hirondelle que ce néolithique, l’Homme devenant éleveur, en plus du logis, il lui offrit dès lors le couvert en favorisant la prolifération de certains insectes volants comme les mouches qui elles profitaient du bétail et leurs déjections.
Et l’Homme créa l’étable, le quatre étoiles de l’hirondelle.
Mais après des siècles et des siècles d’étables, une nouvelle aire arriva, celle du garage bétonné, sans mouches, bien propre. D’une population humaine essentiellement rurale jusque là, qui plus est avec son bétail et sa basse-cour dans chaque famille, on passe à une société urbaine. Pendant que le nombre d’exploitations agricoles chute, une orientation nouvelle de l’agriculture vers le tout céréales intensif modifie les conditions d’accueil potentiel pour l’oiseau . Sale temps pour notre hirondelle. Les temps changent. Après des siècles de prospérité, c’est le déclin. La sympathie portée à cette boule de plumes, mignonne, courageuse dans ses voyages, fidèle au nid, utile, annonciatrice du printemps, ….ne change rien à l’affaire. De plus, fientes sur les façades ou sur la voiture toute neuve toute propre sont parfois le déclencheur du coup de balai sur le nid….Oiseau symbole, jusqu’à un certain point.
L’histoire de l’hirondelle rustique (mais on pourrait lui inclure l’hirondelle de fenêtre, nichant plus contre les bâtiments) est donc intimement dépendante de celle des humains.
« On a les hirondelles que l’on mérite »
Et le mouton d’Ouessant dans tout cela ? Nous y arrivons.
Une des monographies de la collection Delachaux et Niestlé est consacrée à l’hirondelle rustique. Pour venir en aide à l’espèce l’auteur préconise d’élever quelques Ouessant. C’est certes insuffisant en soi pour renverser le phénomène de déclin, mais les gouttes d’eau faisant les grandes rivières…Il faut voir en cette action qui peut être du niveau individuel, un petit plus pour permettre aux hirondelles de retrouver quelques mouches dont la présence sera favorisée par les déjections et les fumiers.
Le mouton d’Ouessant étant de petite taille, il peut être élevé sur le terrain dont on dispose (2 ou 3 animaux pour 1500 m2) sans avoir à passer nécessairement la tondeuse.
Même si je relativise le déclin des hirondelles, je n’en suis pas moins de ceux qui leur souhaitent de mieux se porter et qui trouvent tout le plaisir à les côtoyer et les accueillir. Pourtant, ce qui n’a pas de rapport direct, j’ai vu mes dernières nicheuses disparaître alors que je commençais à élever des Ouessant !! Ma soixantaine d’animaux actuels n’a rien changé depuis. Il faut y voir une problématique bien plus vaste au niveau de mon village. Celui-ci ne fait que s’urbaniser un peu plus chaque année, cela faisant disparaître les anciens vergers. Enserré dans l’étau des tentacules céréalières, son bétail a disparu et les dernières prairies font place au maïs. Plus de basse-cour dans les dernières fermes…..Presque plus d’hirondelles.
En écrivant ces lignes, je repense avec émotion à ma dernière nichée. Elle avait grandi dans ce nid utilisé chaque année et qui
était accroché au fil d’attache de l’ampoule juste au-dessus de la porte d’entrée (ce qui avait toujours interdit d’y installer un luminaire…). Les lutines emplumées savaient tout sur le rythme
de vie de la maison. Le grand voyage arriva, puis avril de l’année suivante quand un soir en allumant la lumière d’entrée j’eus la surprise , mes yeux portant sur le nid, de découvrir que trois
hirondelles y étaient couchées et m’observaient ne laissant dépasser que leur tête. Totalement impassibles à la lumière, à ma présence et au choc de la porte après six mois d'absence ,
c’étaient bien des habituées de retour (jeunes, adultes ?). Mais cet instant de ravissement d’il y a une dizaine d’années maintenant fut comme un adieu car depuis….plus rien. C’est bien
triste d’avoir des marches propres… !!
Le Ouessant au secours des hirondelles? Essayons!
(Ponette et son Fromveur font tout pour...)