Pas le furet, mais le renard.
Crottes de type canidé, de taille moyenne, aux segments truffés de poils provenant d'une multitude de petits rongeurs (base de son menu quotidien), laissées de
façon bien visibles (pour les concurrents) ici sur une placette peu végétalisée. C'est bien lui, le renard.
Ma joie à la découverte qu'il est passé dans le quartier (et de plus dans les enclos à moutons ,dont le parc de nuit d'un hectare clos) est grande et
m'amène à lui consacrer ces lignes.
Joie car il y a bien trop longtemps que j'avais pu déceler trace de vie de l'animal autour de chez moi. Il faut dire qu'ici comme en beaucoup
d'endroits, l'homme l'extermine chaque fois qu'il le peut. Une richesse supplémentaire donc dans le monde des Lutins.
J'ai dit qu'il était passé. Oui sans doute car nous sommes en juillet, en pleine période d'émancipation des jeunes qui errent à la recherche d'un territoire.
J'imagine déjà les réactions de ceux qui s'attendaient plus à découvrir ma crainte dans cet évènement. Je n'idéalise pas le renard et je tiens avant toute
chose à être objectif. Ma facette naturaliste me permet de l'être et mes buts d'élevage me permettent de le rester.
Je m'explique. Oui, un renard peut parfois croquer un agneau Ouessant , un grand jeune de quelques mois ou un adulte en très mauvaise santé. Et alors? Une fois en
passant ce n'est pas un drame. Et puis le mouton était-il bien vivant au moment du festin? Si oui, la chose reste rare.
Elle ne m'est pas encore arrivée en quatorze ans. Si un jour cela devait être le cas, je serais triste pour l'agneau et la perte représentée dans mon travail.
Mais ne menant à aucun moment un élevage de profit, cela ne serait qu'un incident de parcours. S'il devait se reproduire, il faudrait alors songer à quelques aménagements ou méthodes, comme
l'enfermement des jeunes pour la nuit...
Comme je l'ai déjà écrit par ailleurs, le renard est bien plus légitime que l'agneau, ce dernier n'étant qu'un prolongement de l''humanité. Il faut bien garder à
l'esprit que déverser de la "viande vivante" dans la nature, c'est lui faire prendre une certaine part de risques.
Risques qu'il faut accepter; Vouloir détruire le renard, n'est qu'une réaction primaire (même si cela soulage un temps) qui déplace le problème et
ignore certains principes qui veulent que d'une part, en libérant un territoire de renard, on l'offre à un autre qui viendra s'installer et que d'une autre, c'est assurer une meilleure
reproduction de l'espèce à l'avenir, puisqu'on favorise ainsi ses espèces-proies que sont les petits rongeurs...
Quelques anecdotes.
D'abord celle d'un temps où je pratiquais encore la photographie animalière mais que je n'ai pas immortalisée sur la pellicule car trop loin de moi. A l'affût
de chevreuils, c'est une chevrette avec ses deux faons que je vis arriver. Superbe en soi, l'instant devint alors merveilleux quand survint un grand jeune renard, de juillet justement. Ce qui
devait arriver....n'arriva pas. Durant un temps qui sembla interminable, s'opéra sous mes yeux une partie de jeux bien imprévisible entre les deux espèces. Cela sous l'oeil attentif mais
aucunement paniqué de mère chevreuil qui continua son repas comme si de rien n'était.
Enfin, une anecdote qui se passait dans l'enclos permanent de mes moutons, en pleine période de nourrissage des jeunes renards, et sans problème particulier pour
mes Ouessant. Un renard y venait régulièrement. Jamais je ne l'ai vu mais il laissait sa signature. D'abord, ce fut la carcasse à moitié enterrée d'un de ces "faisans chair à canons" libérés
l'automne précédent, qui avait survécu jusque là et dont les longues rectrices dépassaient du sol. Quelques jours plus tard, une patte de poulet, peut-être simplement récupérée sur un
tas de fumier, était mise en réserve et laissait voir quelques doigts. Plus tard, c'est....une espadrille qui subissait le même sort (maître renard par l'odeur alléché...).
Si comme le commun des mortels de mon espèce, j'avais un besoin important de monstres sanguinaires pour rompre mon ordinaire, j'aurais pu écrire qu'ensuite ce fut
le propriétaire de la dite chaussure que je retrouvai enterré dans le parc...mais non cela n'arriva pas, je n'ai plus eu traces de ce renard.
Non, je n'idéalise pas le renard. Je vois simplement ce qu'il est. Un animal comme un autre.
Qu'on ne m'accuse pas non plus de vouloir "blanchir" les prédateurs, car je pourrais mentionner les centaines de divers autres animaux domestiques que j'ai pu
perdre dans mes différents élevages de par leur prédation, pour montrer que je sais ce que c'est que de perdre.
Enfin, je terminerai en disant que je crains bien plus les chiens errants et ceux de chasse pris dans leurs élans, que les renards.
Sans oublier la bêtise humaine. Vols chez un collègue éleveur. Ou comme cet imbécile de premier ordre qui depuis bientôt un an cisaille régulièrement le
câble d'entrée d'un de mes enclos. Puis-je rêver que son coefficient intellectuel soit suffisant pour l'amener un jour à parcourir cet article....s'il sait lire...et comprendre
tout le mépris que je peux avoir pour les gens de son "espèce".