...mais belle.
Fantômette vient d'avoir un mois en fin de semaine dernière. La fille
cachée
Depuis le dernier article la concernant, elle a traversé bien des mésaventures.
Il y eut d'abord, durant un de ses stages de contact avec le troupeau, la fois où elle s'est égarée, mal voyante et perdue dans les herbes hautes. Au moment du
biberon, plus de Fantômette. Il fallut s'y résoudre, elle était sortie de l'enclos dont les mailles sont de taille à laisser passer un jeune agneau curieux ... ou égaré. Un peu de panique en moi,
me demandant si je pourrais la retrouver dans une campagne luxuriante et sans obstacles artificiels. Après un bon quart d'heure de recherches, je la découvris dormant en boule au soleil, derrière
une haie dans une pâture à vaches charolaises qui heureusement menaient leur vie sur la bordure opposée. Innocente, vulnérable, elle eut la chance que j'oriente mes investigations dans la
bonne direction.
Depuis une dizaine de jours, son oeil gauche est atteint d'une kératite. Sans doute le résultat d'une petite blessure du fait que, mal voyante, elle repère moins
les dangers des obstacles. Avec donc provisoirement seulement un oeil partiellement fonctionnel, cela ne l'empêche pas de me suivre. Il y a une semaine, elle arriva avec moi dans l'enclos
des ânes. Je tenais l'ânesse ayant un petit quand Fantômette se croyant perdue s'engouffra entre les pattes de la mère. Cette dernière, prise de panique devant cette petite bestiole, se
mit à ruer et râler. L'agnelle un peu ko n'angoissa que davantage et ne trouva rien de mieux que de revenir se glisser sous le danger, attirée malgré tout par cette forme lui indiquant une
présence. Un léger shoot de ma part dans la pelote blanche encore vivante heureusement, accompagné d'une récupération, me permit de la sortir de la situation dramatique. Pendant un instant, je me
demandai si je n'allais pas être contraint de la sacrifier. Mais elle n'était finalement pas mourante, seulement assommée avec une dent cassée qui saignait suite à un coup de sabot. Ouf! Que
d'émotions! Une journée de repos la remit sur pattes.
Et puis, hier soir...l'orage grondait et la pluie se mit à tomber. Une séparation s'imposait car difficile de rentrer à la maison une agnelle qui soulage sa vessie
là où elle se trouve. Je plaçai donc Fantômette dans le garage en la couchant dans son carton. Trois heures plus tard, la pluie cessa et comme le moment du biberon était arrivée, je
décidai de rejoindre ma protégée. Stupeur! Plus personne dans le garage! Après avoir inspecté les coins et recoins, je devais me résoudre à admettre qu'elle était partie dans la rue en passant
par un minuscule soupirail. Panique à la nuit tombante. La voie est une impasse sans circulation mais qui donne sur plusieurs chemins et une campagne non habitée. Me voilà
donc parti en expédition, la lampe à la main, à la nuit tombante qui devint vite noire de par ce temps. Appels incessants en prononçant son nom, en empruntant tous les chemins et
autres passages, scrutant sans trop y croire les talus gorgés d'eau et le coeur des haies. Je n'y croyais pas, n'y croyais vraiment plus. Une heure de recherches déjà. Mais il n'y avait rien
d'autre à faire, chercher, quitte à y passer la nuit., imaginant déjà le moment où les lampes rendraient l'âme les unes après les autres. Je ne pouvais laisser une agnelle de 2,5kg à son triste
sort, trempée, affamée, grelottante, angoissée...mourante? à la merci d'un renard ou d'un chien errant ainsi qu'aux mille et un pièges que peut rencontrer un si petit animal mal voyant. Peut-être
était-elle tout près à chacun de mes pas, tapie dans les hautes herbes, épuisée, vacillante...? Je finis par avancer, chercher, appeler de manière mécanique sans conviction, passer et repasser
aux mêmes endroits, voir ailleurs, me mettant à la place de Fantômette, son mental, sa taille, son handicap ... pour imaginer où je pourrais aboutir. Et là, tout à coup, dans le faisceau de la
lampe faiblissante, un petit fantôme blanc, minuscule jouet mécanique sorti de la nuit, apparut gueule ouverte et muette des appels de détresse qu'elle cherchait à émettre. Retrouvailles dans les
émotions réciproques qu'on imagine. Depuis combien de temps errait-elle? Où? M'avait-elle entendu pour apparaître là où je repassais presque par hasard? Peu importe, le présent seul comptait.
Après un bon biberon et quelques frictions de serviette, Fantômette, dans son petit carton près du lit , et moi avons passé un reste de nuit particulièrement agréable.
Aujourd'hui, il ne reste rien de tout cela, si ce ne sont des souvenirs forts...et encore un peu de cornée opacifiée, en cours de guérison heureusement. Le
"sourire" de Fantômette méritait bien toute cette attention ("Commence et l'impossible deviendra possible"...disait...)